Ouest-Tribune Le Premier Quotidien de l'Oranie Hillary Clinton en visite en Algérie :
Alger et Washington accordent leurs violons sur le Mali
La secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, a effectué, hier, une visite de travail en Algérie. Elle a été reçue par le président Abdelaziz Bouteflika pour discuter, notamment, d’un soutien algérien à l’option militaire au Mali afin d’en chasser les groupes terroristes. Arrivée très tôt, Mme Clinton a d’abord rencontré son homologue Mourad Medelci qui l’a accueillie à sa descente d’avion avant d’être reçue, en fin de matinée, par le président pour des entretiens, en présence de plusieurs ministres algériens, suivis d’un déjeuner.
«Nous avons eu une discussion approfondie sur la situation dans la région et en particulier sur le Mali», a déclaré Mme Clinton aux journalistes. «J’ai beaucoup apprécié l’analyse du président, fondée sur sa longue expérience, concernant les nombreux facteurs complexes inhérents à la sécurité intérieure du Mali, ainsi que sur la menace que le terrorisme et le trafic de drogue font peser sur la région et au-delà», a-t-elle ajouté.
«Nous avons convenu d’assurer le suivi de ces discussions par le biais de discussions d’experts et nous allons poursuivre ce travail en mode bilatéral et avec les partenaires de la région, en concertation avec l’Union africaine, la Cédéao (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest) et les Nations unies pour essayer de trouver des solutions à ces problèmes», a-t-elle ajouté.
«L’Algérie, étant l’Etat le plus puissant du Sahel, elle est devenue un partenaire crucial pour s’occuper d’Aqmi (Al-Qaïda au Maghreb islamique)», a expliqué un responsable du département d’Etat à bord de l’avion de Mme Clinton.
Pour sortir de la crise malienne, «l’Algérie doit être au centre de la solution», a insisté ce responsable américain. L’Algérie adopte, depuis le début de la crise malienne, une position rationnelle, réaliste et cohérente. Elle privilégie une solution politique qui passerait par un gouvernement légitime à Bamako. Cette solution conduirait naturellement à une intervention militaire à travers les forces africaines et celles du champ pour reconquérir le Nord-Mali.
L’Algérie a prévenu, notamment la France, contre toute précipitation à envoyer des forces africaines dans le Nord-Mali pour éviter une opération coûteuse et contre-productive. Depuis avril, des groupes terroristes comme Aqmi et leurs alliés touaregs d’Ansar Dine et du groupe jihadiste Mujao occupent le Nord du Mali, imposant la chariâa et une partition de ce pays qui partage 1.400 km de frontière avec l’Algérie.
Tout en privilégiant la négociation, Alger n’exclut pas le principe d’une opération armée à la condition qu’elle soit exclusivement africaine et qu’elle n’y participe pas directement.
La communauté internationale a adopté le 12 octobre, via le Conseil de sécurité de l’ONU, une résolution préparant le déploiement d’une force internationale de quelque 3.000 hommes au Mali.
Le Conseil a donné jusqu’au 26 novembre à la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) pour préciser ses plans.
De fait, a assuré un autre diplomate américain, les Algériens «sont de plus en plus chauds face à cette idée» de forces ouest-africaines. Dotée d’une armée puissante, Alger dispose de renseignements et d’une expertise indéniable en contre-terrorisme pour avoir combattu pendant dix ans le terrorisme et d’une influence auprès des Touaregs pour avoir plusieurs fois facilité des pourparlers entre l’Etat malien et la rébellion.
Les Etats-Unis et la France, en pointe sur ce dossier, sont disposés à fournir un appui logistique, mais considèrent avant tout que l’Algérie est «incontournable» dans le règlement de cette crise. Paris pousse aussi Alger à donner son feu vert à une opération internationale, mais des experts et des diplomates pensent que Washington, qui n’entend pas se précipiter, a davantage l’oreille d’Alger.
«Au vu de l’étroite collaboration militaire et sécuritaire entre les Etats-Unis et l’Algérie, les Américains pourraient être plus compréhensifs que la France sur cette allergie algérienne face à une intervention militaire étrangère, analysait il y a quelques jours Gilles Yabi, de l’International Crisis Group (ICG).