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Pour Harlem Désir, le plus dur est à venir
Mis à jour le 19/10/2012 à 06:53 | publié le 18/10/2012 à 23:37
Harlem Désir, lors d'une conférence de presse, au siège du parti socialiste.
Le nouveau premier secrétaire du PS a été élu sans surprise, recueillant un peu plus de 70% des suffrages, mais avec une participation très moyenne. Il doit imprimer sa marque au parti sans gêner l'exécutif.Harlem Désir n'est plus un intérimaire. Les militants l'ont désigné jeudi comme le premier secrétaire du PS. Sans surprise, il gagne face au candidat de l'aile gauche du parti, Emmanuel Maurel. Mais c'est une victoire sans relief pour l'eurodéputé et ancien président de SOS Racisme. Jeudi, en fin de soirée, sur la base de 68,4 % de dépouillements, le PS indiquait que Désir l'emportait avec 71,9 % des voix contre 28,1 % pour Maurel, qui double ainsi son score par rapport au vote de jeudi 11 octobre. Désir n'a donc pas su mobiliser, au terme d'une campagne rude où sa personnalité - terne -, son mode de désignation - opaque - et le résultat - décevant - de sa motion avaient été critiqués.
Mais le plus dur est à venir. Premier problème: partager les postes dans les instances dirigeantes, ménager les équilibres et les ego. Tous les «éléphants», la quasi-totalité du gouvernement, les ténors du parti et presque tous les courants du PS étaient derrière lui: les aubrystes, les hollandais, les ségolénistes, etc. Sans compter les hamonistes, regroupés dans le courant «Un monde d'avance». Situés à la gauche du parti, ils avaient accepté de ne pas présenter de motion et obtenu en contrepartie trente places au conseil national qui en compte 204. L'affaire avait été négociée au plus haut niveau entre François Hollande en personne et le ministre Benoît Hamon. Tout avait été réglé à l'avance.
«Mon rôle de rassembleur»Mais le score décevant de la motion «magma» oblige à revoir la copie. Au lieu des 186 sièges attendus au conseil national, les soutiens de Désir devront faire avec 140 sièges. «Les ségolénistes et “Un monde d'avance” vont morfler. Je ne vois pas comment “Un monde d'avance” pourrait avoir plus de postes que nous qui en avons décroché 28 grâce au score de notre motion», prédit un élu PS proche d'Emmanuel Maurel. «Et comme, en plus, Harlem a promis la parité dans toutes les instances du parti, il va falloir aussi virer des hommes», poursuit cet élu, se délectant à l'avance des conflits à venir.
Interrogé sur cette question, Désir ne nie pas les difficultés: «J'inciterai les uns et les autres à se mettre d'accord. C'est mon rôle de rassembleur. Et c'est ce que les militants attendent de moi.» La question est de savoir si le nouveau premier secrétaire sera bien associé aux tractations entre les écuries et à celles qui ont débuté entre les hollandais et les aubrystes.
Pour Désir, d'autres viendront un peu plus tard quand il faudra que le PS - désormais parti majoritaire - trouve ses marques vis-à-vis de l'exécutif. Faire vivre les débats quitte à se démarquer de l'action gouvernementale? Se ranger derrière l'Élysée et le gouvernement au risque de laisser le champ libre à la gauche de la gauche et aux alliés écologistes?
Peu avant son élection, Désir avait une position tranchée sur la question. «Les militants, disait-il, souhaitent qu'il y ait une grande liberté de débats et que le parti puisse enrichir les propositions.» Lui-même avait aussi marqué sa différence à deux reprises, sur l'objectif de réduction des déficits affiché par le gouvernement mais aussi sur le mariage homosexuel et la procréation médicalement assistée. Désir était alors en campagne. Qu'en est-il maintenant qu'il est à la tête du parti et que le premier ministre Jean-Marc Ayrault multiplie les démonstrations d'autorité vis-à-vis de sa majorité? «C'est très difficile de gérer un parti dans une position de pouvoir, surtout au PS, note le président du conseil régional d'Ile-de-France Jean-Paul Huchon. Les socialistes entretiennent une relation complexe vis-à-vis du pouvoir.»
Une chose est certaine, l'aile gauche du PS, et sa figure montante Emmanuel Maurel, poussera pour que les débats soient sans tabou. Et les hamonistes réunis dans «Un monde d'avance», parce qu'ils ont le sentiment d'avoir reculé de quelques cases ces derniers mois, ne seront pas en reste. «Si on congèle le parti, ce sera la pire chose qui puisse arriver à l'exécutif parce qu'il n'aurait plus de corde de rappel», avertit Guillaume Balas, président du groupe PS à la région Ile-de-France et proche de Benoît Hamon. Désir est prévenu. Ayrault aussi.