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Les boissons sucrées, facteur de surpoids
Publié le 24/09/2012
La consommation de boissons sucrées en France est passée de 57 litres par an et par habitant en 2006 à 66 litres cinq ans plus tard.
Riches en calories, elles trompent le cerveau car elles n'offrent aucune sensation de satiété. Voilà des années que les nutritionnistes accusent les boissons sucrées de contribuer à l'épidémie mondiale d'obésité. Leurs craintes viennent d'être confirmées par la principale ­revue médicale internationale, le
New England Journal of Medi­cine, qui publie trois études montrant le rôle direct de ces boissons dans la prise de poids, ­notamment chez les enfants et les ­adolescents.
La première étude, réalisée au Boston Children's Hospital (États-Unis), mesure l'efficacité d'une intervention auprès de 110 adolescents obèses, filles et garçons, pour les aider à réduire leur consommation de boissons sucrées au profit de boissons light. Après un an, ces adolescents pesaient en moyenne 2 kg de moins que les jeunes du groupe n'ayant bénéficié d'aucun soutien. Cet effet ne s'est cependant pas maintenu dans le temps.
Comme le soulignent tous les nutritionnistes, le principal effet négatif des boissons sucrées - sodas, limonades ou jus de fruits - est d'apporter une quantité importante de calories. «Dans un litre de soda, il y a l'équivalent de 20 sucres, soit 400 kilocalories», explique le Pr Jean-Michel Lecerf, à l'institut Pasteur de Lille. Or ces calories ne sont pas comptabilisées en tant que telles par le cerveau, qui les classe dans les apports hydriques.
Ainsi, inconsciemment, un jus de pomme paraît moins calorique qu'une pomme. «Avec les boissons sucrées, les sensations de rassasiement et de faim sont brouillées», résume le Dr Laurent Chevallier, qui dirige une unité multidisciplinaire de médecine environnementale à Montpellier.
Et le risque est identique avec les jus de fruits: «Les gens ne réalisent pas que dans un verre de jus de fruits, il y a du sucre et des calories», explique le Dr Arnaud Cocaul, nutritionniste et concepteur d'une application pour smartphone (KcalMe) qui permet de suivre au fil de la journée sa consommation de calories. La recommandation est donc de limiter au minimum - une canette par jour, par exemple, selon le Pr Lecerf - la consommation de boissons sucrées. L'idéal est de s'en tenir à la seule boisson utile à notre organisme: l'eau, surtout à l'heure des repas.
Ou de remplacer les boissons sucrées par des boissons édulcorées, qui n'apportent aucune calorie. C'est ce que montre la deuxième étude publiée dans le
New England. Cette recherche conduite à l'université d'Amsterdam consistait à remplacer des boissons sucrées par des boissons «light» pour la moitié d'un groupe de 641 enfants âgés de 5 à 12 ans. Après un an et demi, ces derniers avaient pris en moyenne 7 kg là où leurs petits camarades avaient grossi de 8 kg. Une différence significative mais à considérer avec prudence, car un quart des enfants avaient abandonné l'étude en cours de route.
17 % des apports caloriques«Le point faible de ces études est de n'avoir, chaque fois, considéré que le contenu et non le contenant. Les études sur le bisphénol A et les perturbateurs endocriniens montrent que l'on ne peut en faire abstraction», regrette toutefois le Dr Chevallier. Il n'est pas sûr non plus que l'on puisse extrapoler les résultats observés aux États-Unis avec les habitudes françaises.
Enfin, la troisième étude, du département de nutrition de la faculté de Harvard, montre que les adultes qui ont le profil génétique le plus à risque d'obésité sont aussi ceux qui prennent le plus de kilos lorsqu'ils boivent des boissons sucrées.
Certes les Américains boivent encore nettement plus de boissons sucrées que les Français: «4,5 fois plus de sodas et 1,7 fois plus de liquide», selon une comparaison publiée par le Crédoc dans sa lettre mensuelle datée de septembre.
Autre différence de taille, «alors que les quantités énergétiques consommées ne sont pas différentes, la part de l'énergie apportée par les liquides représente 17 % des apports totaux en énergie, contre seulement 10 % en France». Il n'empêche: la consommation de boissons sucrées en France ne cesse d'augmenter, passant de 57 litres par an et par habitant en 2006 à 66 litres cinq ans plus tard. Les jeunes adultes sont les premiers concernés.
Cette hausse préoccupante a conduit le gouvernement de François Fillon à mettre en œuvre en 2011 une taxation spécifique des boissons sucrées et édulcorées. Mais cette mesure ne fait pas l'unanimité. «Il est délicat de montrer du doigt une catégorie d'aliments, remarque le Pr Lecerf. Mieux vaut privilégier l'éducation.» À l'occasion de la réévaluation des recommandations alimentaires, l'Agence nationale de sécurité sani­taire et de l'alimentation (Anses) s'apprête d'ailleurs à rouvrir le dossier des boissons sucrées.