Libye : des mausolées musulmans détruits par des islamistes radicaux
le 25.08.12 | 15h08 | mis à jour le 25.08.12 | 18h00
Des islamistes intégristes ont détruit samedi à coups de pelleteuse le mausolée d'un saint musulman à Tripoli et ont profané sa tombe, au lendemain de la destruction dans l'ouest de la Libye du plus important mausolée du pays.
Samedi matin, des islamistes radicaux ont utilisé une pelleteuse et un marteau-piqueur pour démolir le Mausolée d'Al-Chaab al-Dahmani, près du centre de la capitale libyenne, et ont profané le tombeau de ce sage, lieu de pèlerinage pour certains musulmans, notamment les soufis, selon le journaliste.La veille, des dizaines d'intégristes avaient fait exploser le Mausolée du cheikh Abdessalem al-Asmar, un théologien soufi du XVIème siècle, à Zliten, à 160 km à l'est de Tripoli, théâtre d'affrontements depuis jeudi soir, selon une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux.
Sur cette vidéo, on peut voir l'explosion du mausolée, le plus important en Libye, sur fond de cris proclamant "Dieu est le plus grand".
Une bibliothèque et une université au nom du cheikh al-Asmar ont également été la cible d'actes de destruction et de pillage, selon des sources de sécurité locales.
Par ailleurs, des témoins ont indiqué samedi à l'AFP qu'un autre mausolée, celui du Cheikh Ahmed al-Zarrouk, avait été détruit à Misrata, à 200 km à l'est de Tripoli.
Les intégristes s'opposent à ces sanctuaires érigés à la mémoire de saints car ces derniers font l'objet d'une "vénération" qui, selon eux, contrevient à l'unicité de Dieu, précepte fondateur de l'islam.
Sur Twitter, le vice-Premier ministre Moustapha Abou Chagour, a qualifié la destruction des mausolées de "crimes" dont les auteurs "seront tenus responsables".
Dans un autre tweet, il a assuré avoir "demandé hier aux ministères de la Défense et de l'Intérieur d'intervenir mais ils n'ont pas accompli leur devoir de protéger ces sites".
Dar Al-Ifta, la plus haute autorité religieuse en Libye, a affirmé dans un communiqué que la profanation de tombes de musulmans ou de non musulmans était contraire à l'Islam mais ne s'est pas exprimée explicitement sur la destruction des mausolées.
Un membre éminent de la communauté soufie en Libye, Ossama Bwera, a dénoncé de son côté l'"ignorance des profanateurs qui se font appeler salafistes".
"Ces attaques ne visaient pas en particulier le soufisme mais la culture et la civilisation musulmane en Libye en général", a-t-il dit à l'AFP.
Contacté par l'AFP, le directeur du Département des Antiquités de Libye, a condamné ces "actes isolés", indiquant toutefois que son département n'était pas concerné par ce sujet, dans la mesure où les mausolées ne sont pas inscrits au patrimoine archéologique national.
Sur les réseaux sociaux, les avis étaient partagés, entre internautes approuvant la destruction de ces mausolées considérés comme "contraires à l'Islam", et d'autres dénonçant la "profanation des tombes" et des attaques "contre le patrimoine culturel" libyen.
Des affrontements se déroulent depuis jeudi soir à Zliten et ont fait au moins trois morts et plusieurs blessés.
Des informations contradictoires circulent sur leurs causes, certains évoquant un meurtre, d'autres affirmant qu'il s'agit de heurts entre islamistes partisans de la destruction du mausolée et d'autres qui y étaient opposés.
Cet été, des mausolées de terre, classés au patrimoine de l'humanité par l'Unesco, avaient été détruits dans le nord du Mali par des intégristes musulmans.
AFP
© El Watan