François Bayrou fait "le choix de François Hollande" mais "ne donne pas de consigne de vote"

François Bayrou fait "le choix de François Hollande" mais "ne donne pas de consigne de vote"

Le Monde.fr | 03.05.2012 à 19h31 • Mis à jour le 03.05.2012 à 20h05


François Bayrou a annoncé jeudi soir, à son QG de campagne, qu'il ferait personnellement "le choix de François Hollande" pour le second tour de l'élection présidentielle. Mais au nom de la "diversité [qui] est la nature propre" du MoDem, il a indiqué qu'il ne "donnerait pas de consigne générale de vote" à ses militants.

Lors d'une déclaration de quelques minutes devant la presse, François Bayrou s'en est pris à "la ligne choisie par Nicolas Sarkozy, violente, [qui] rentre en contradiction avec nos valeurs, les miennes, mais aussi celles du gaullisme. (...) Comment en est on arrivé là ? C'est l'histoire de cette élection", a indiqué l'ancien candidat centriste, arrivé cinquième au premier tour, le 22 avril.

François Bayrou a également précisé ne pas vouloir "voter blanc, ce serait de l'indécision. Reste le vote pour François Hollande : c'est le choix que je fais."'

L'ENTRE-DEUX-TOURS DE SARKOZY MODÉRÉMENT APPRÉCIÉ

L'hypothèse d'un vote blanc, longtemps dominante, a été combattue par une majorité du conseil stratégique de sa campagne, jeudi matin.

Ceci alors que les membres du MoDem, tout comme son chef de file, avaient multiplié ces derniers temps les critiques contre la campagne de l'entre-deux-tours menée par Nicolas Sarkozy.

Lire la tribune : Valeurs contre valeurs, le 6 mai, nous voterons François Hollande
http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/05/03/valeurs-contre-valeurs-le-6-mai-nous-voterons-francois-hollande_1694899_3232.html
Lire M. Bayrou hausse le ton face à M. Sarkozy sur la question des valeurs
http://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2012/article/2012/04/26/m-bayrou-hausse-le-ton-face-a-m-sarkozy-sur-la-question-des-valeurs_1691657_1471069.html
Si François Bayrou n'avait pas clairement exprimé ce choix lors du conseil national du MoDem, jeudi après-midi, c'est ce que la plupart des participants avaient déjà compris entre les lignes dans la journée.

Marielle de Sarnez, bras droit de François Bayrou, avait, selon plusieurs participants, dit au cours de cette réunion qu'elle se prononcerait elle aussi en faveur du candidat socialiste.

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L'UMP minimise le choix de Bayrou, le PS jubile

Publié le 03/05/2012 à 00:00



François Fillon pointe «l'avis d'un homme seul», pendant que François Hollande salue «l'indépendance» de François Bayrou.

Sitôt tombée l'annonce du vote de François Bayrou en faveur de François Hollande, dimanche prochain au second tour de la présidentielle, les réactions politiques ont fusé, jeudi soir.

À droite: entre incompréhension et indignation

À l'UMP, on accusait le coup. «Je ne comprends pas, a réagi le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé. François Bayrou n'est pas socialiste. Dès le 7 mai, il s'opposera à François Hollande.» Le président du MoDem «vote contre ses convictions: il choisit le parti de la dette et de la dépense», a renchéri sa collègue Valérie Pécresse, en charge du Budget. Le député du Nord Sébastien Huyghe va plus loin et dénonce: «Bayrou fait passer sa haine personnelle avant sa cohérence politique.»

La déception était sur toutes les lèvres, chacun essayant de minimiser la portée de l'annonce de François Bayrou. François Fillon veut croire que «c'est l'avis d'un homme seul qui s'exprime». «Ce choix, c'est le sien, ce n'est pas le nôtre», insiste le premier ministre, relayé par Éric Ciotti: «J'ai confiance en la raison des électeurs de François Bayrou qui sauront faire le choix de la cogérence et soutiendront au second tour Nicolas Sarkozy», estime le député des Alpes-Maritimes.

«Je ne pense pas que cela pèse vraiment sur le second tour, affirme Bruno Le Maire, ministre de l'Agriculture. La décision de François Bayrou va déstabiliser beaucoup de gens, notamment des électeurs de François Hollande.» C'est aussi ce qu'espère Xavier Bertrand, ministre du Travail. «En 2007, Bayrou s'était déjà prononcé contre Nicolas Sarkozy (en votant blanc, NDLR). On ne peut pas dire que c'était un bon pronostiqueur! Ses choix ne portent pas chance à celui qu'il choisit.»

Au centre: entre résignation et stupéfaction

Le choix «individuel» de François Bayrou a réveillé les lignes de fracture qui traversent le centre. «C'est pour moi une grande tristesse, a déploré le ministre de la Justice, Michel Mercier. L'antisarkozysme peut être un sentiment mais ne sera jamais une politique.» Les mots claquent, la déception est forte. «Il s'est mis hors des cordes. Il a franchi la ligne et je le regrette profondément», juge encore Yvan Lachaud, président du groupe Nouveau Centre à l'Assemblée. Yves Jégo, député radical, assène: «Bayrou, par son attitude, vient de tuer pour longtemps toute idée de reconstitution d'un centre indépendant en ­France.»

Hervé Morin, plus mesuré, tente d'expliquer la décision de Bayrou, qu'il dit lui aussi «regretter»: «Si François avait dit aux Français: “Je vote Nicolas Sarkozy”, c'était dire: “Je me suis trompé en 2007.” Au fond de lui-même, il y avait la nécessité de démontrer: “Je ne me trompe jamais”», éclaire le président du Nouveau Centre.

À gauche: entre prudence et soulagement

«Le rassemblement, c'est maintenant!», a twitté Faouzi Lamdaoui, chef de cabinet de François Hollande. Le candidat socialiste, qui a salué «l'indépendance, la liberté» de François Bayrou, a accueilli la nouvelle de son vote dimanche avec prudence. «Je ne le prends pas comme un ralliement, en aucune façon, a-t-il tempéré. Il n'y a eu aucune discussion, aucune négociation entre nous. C'est le choix citoyen d'un homme qui considère que pour son pays, il y a une solution à éviter.»

Plus emphatiques, ses proches ont souligné un acte «de courage et de clarté», Ségolène Royal évoquant une décision «formidable et honorable». La patronne du PS, Martine Aubry, a applaudi «un choix de valeurs, un choix que les démocrates et les humanistes peuvent partager». Et l'ex-bayrouiste Corinne Lepage, qui a apporté sa voix à Hollande, de regretter que Bayrou «n'ait pas osé aller au bout de son choix en appelant ses électeurs à faire de même».

Même Jean-Luc Mélenchon a rendu hommage à François Bayrou, soulignant qu'il était animé «d'un honnête sentiment républicain». Mais le leader du Front de gauche a aussitôt précisé: «Bien sûr, je ne suis pas naïf. Je tiens à l'œil l'ami de la règle d'or.»

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Bayrou : manque de "cohérence" (Sarkozy)

Mis à jour le 04/05/2012 à 08:18 | publié le 04/05/2012 à 07:41



Nicolas Sarkozy, le président-candidat ne voit pas de "cohérence" dans le choix de François Bayrou de voter pour François Hollande.

"François Bayrou a le droit de faire les choix qu'il souhaite. Il est assez constant puisqu'en 2007, il avait indiqué qu'en aucun cas, il ne voulait voter pour moi. A l'époque, il ne parlait pas de ma violence. Je devais avoir d'autres défauts. Mais cela ne m'avait pas empêché d'emporter l'élection", a déclaré Nicolas Sarkozy ce matin sur Europe 1.

"François Bayrou a indiqué qu'après avoir bien réfléchi, il allait voter Hollande et il poursuit : 'qui conduira le pays à la faillite au mois de février'. C'est sa logique. On a du mal à y trouver une certaine cohérence", a-t-il précisé. Selon lui, les électeurs du MoDem ont voté au premier tour sur un programme axé sur le "pas de faillite, pas de déficits, on veut la règle d'or", et "François Bayrou en tire la conséquence qu'il faut voter pour le candidat qui dit le contraire de ce qu'il a proposé".

"C'est un choix, j'aurais préféré bien sûr qu'il fasse un autre, mais qu'est-ce que vous voulez ? Que je l'accable ?", a dit le président-candidat. "Je comprends qu'il y ait un peu d'amertume de la part d'un homme qui a perdu en un quinquennat la moitié de ses électeurs sans avoir à gouverner."