Projection de Germaine Tillon au Palais de la Culture : Yacef Saâdi rencontre son public

PROJECTION DE GERMAINE TILLON AU PALAIS DE LA CULTURE :

Yacef Saâdi rencontre son public

Lundi 23 Avril 2012

Par O. HIND


Une humaniste qui a sauvé de la guillotine près de 265 personnes dont Yacef Saâdi

«Nous avons fait 50% de notre travail, à vous de faire les 50% restants pour qu'on ait notre Indépendance à 100% et que les autres pays cessent de nous humilier...»

Yacef Saâdi, chef de la Zone autonome durant la guerre de Libération nationale et héros du célèbre film La bataille d'Alger a présenté samedi après-midi au Palais de la culture Moufdi-Zakaria un hommage à Germaine Tillon sous forme de documentaire où, à travers lequel, il témoigne de la précieuse aide qu'a faite cette femme humaniste en l'ayant sauvé à l'époque de l'exécution radicale soit par la guillotine, lui et près de 265 hommes et ce, en plaidant leur cause auprès de différents responsables et hommes politiques très importants dont le général de Gaulle. Samedi 21 avril a été choisi par Yacef Saâdi comme date commémorant sa mémoire, elle qui est décédée le même jour en 2008. «Je voulais lui rendre le bien qu'elle m'a fait. Je la considère comme une seconde maman.»

Condamné à mort trois fois, Yacef Saâdi doit ainsi sa survie à cette femme téméraire ayant vécu pendant 14 ans dans les Aurès, a eu à endurer les affres de la Seconde Guerre mondiale avant d'être envoyée en mission dans le cadre d'une commission pour visiter les prisons algériennes et créer des centres sociaux pour s'occuper des Algériens démunis. C'est tout ce côté humaniste qui caractérise cette femme que notre héros de La bataille d'Alger a voulu souligner à travers le portrait de cette femme qui n'a pas hésité à mettre le haïk et se balader dans la Casbah pour venir en aide à nos moujahidine, à l'image de Zohra Drif, Ali la Pointe.., des noms symboles de la Révolution, lesquels sont évoqués dans ce film. «Elle voulait contribuer à ramener la paix dans le pays», entendons-nous. Car c'est mue par la volonté de faire cesser la violence que cette dame s'est engagée auprès des Algériens en ne cessant pas de défendre leur cause auprès des Français, bien qu'elle les ai traités au départ d'«assassins»...

Et c'est Yacef Saâdi, lequel avait lu tous ses livresn, qui réussira à la convaincre de se rallier à leur cause et faire cesser les exécutions par la guillotine. Dans ce documentaire qui évoque la torture, - à une seule voix et sans d'autres témoignages - il est clairement rendu hommage à cette femme et ses innombrables efforts pour la pacification de la guerre. «Je souhaite que notre gouvernement reconnaisse cette femme ethnologue et humaniste, ne serait-ce qu'en attribuant son nom à une impasse», a dit Yacef Saâdi qui se défendra d'être un héros, arguant que «les véritables héros ce sont ceux qui sont morts pour la patrie» tout en exhortant la jeunesse à prendre la relève. «Nous avons fait 50% de notre travail, dira-t-il, à vous de faire les 50% restants pour qu'on ait notre Indépendance à cent pour cent et que les autres pays cessent de nous humilier. Ce qui m'intéresse ce ne sont pas les vieux, mais les jeunes dont beaucoup aujourd'hui partent à la dérive que ce soit dans l'alcool ou comme des harraga. Cette femme a tout donné. Elle avait déjà fait l'apprentissage de la torture.

J'aurai aimé qu'il y ait des jeunes parmi nous pour ressentir son combat. C'est à eux de reprendre le flambeau. L'avenir appartient à la jeunesse.»Et de renchérir: «Les français nous ont spoliés, volé nos terres, notre blé, notre argent. Aujourd'hui, la moindre pierre, que ce soit à Alger, Oran, Meghnia ou Biskra m'appartient. Avant, il n'y avait aucune distinction régionaliste. J'ai bataillé pour la liberté de tout le territoire. On s'est tous unis contre un seul ennemi.» Brut comme documentaire, notons que ce dernier ne rentre pas dans le cadre de la célébration du cinquantenaire de l'Indépendance algérienne dans le sens où il a été réalisé sur les propres fonds de Yacef Saâdi et projeté samedi dans un cadre non officiel, si ce n'est en la présence de quelques moudjahidines, femmes et hommes, qui ont rehaussé de leur présence cette timide mais néanmoins franche assemblée, entre anciens combattants de la Guerre d'Algérie.

Une rencontre qui a rendu prolixe Yacef Saâdi avouant avoir refusé de participer au colloque de Marseille, organisé au début du mois, par la revue Mariane autour du Cinquantenaire.