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Otite, angine, sinusite : les antibiotiques souvent inutiles
Publié le 12/02/2012
On compte trois millions de cas de rhinopharyngite en France chaque année.
Les études montrent que ces médicaments ne permettent pas de guérir plus vite. Si vous avez une sinusite et ne prenez pas d'antibiotiques, il y a de fortes chances que vous guérissiez de la même façon qu'en en avalant pendant 10 jours.
Une étude réalisée par l'Université de Saint-Louis (États-Unis) publiée dans le réputé
Journal of the American Medical Association vient de le démontrer. Dès le troisième jour après la consultation initiale, un tiers des malades allait mieux avec seulement un traitement contre la douleur, la congestion nasale et la fièvre. Tout comme ceux du groupe qui recevait en plus des antibiotiques. Après dix jours, quatre patients sur cinq allaient mieux que ce soit avec ou sans antibiotiques!
Ces résultats a priori étonnants ne surprennent pas le Pr Christian Chidiac (hôpital de la Croix-Rousse, Lyon): «Le niveau de preuve pour les antibiotiques dans la sinusite est très faible. On peut même dire qu'il n'y en a pas», remarque l'infectiologue, ajoutant: «C'est plus une habitude de prescription.» Il est vrai que la sinusite est un peu à part, explique le Pr Robert Cohen (hôpital de Créteil), président du groupe de travail à l'origine des dernières recommandations du groupe de travail de l'Afssaps (Agence du médicament) sur les anti-infectieux. Car «pour la sinusite, l'examen du patient est trompeur et le diagnostic de sinusite est vraiment difficile à faire, alors que lorsqu'un médecin voit une gorge rouge il fait le diagnostic d'angine et que lorsqu'il voit le tympan il peut repérer une otite». C'est pourquoi, en cas de sinusite, beaucoup de médecins ont la main lourde sur l'antibiothérapie.
Une mauvaise habitude qui n'est d'ailleurs pas limitée à la sinusite puisque les experts sont unanimes à dénoncer l'abus d'antibiotiques dans les autres infections respiratoires hautes: otites, rhinopharyngites, angines. À tel point même que, lorsqu'ils s'adressent aux médecins, les experts se sentent désormais obligés de commencer leurs recommandations sur l'antibiothérapie par décrire les situations dans lesquelles il n'est pas recommandé de prescrire un antibiotique d'emblée!
Une affection bénigneLa rhinopharyngite, par exemple. On compte trois millions de cas chaque année en France, en particulier chez les enfants de moins de six ans qui souffrent de cinq à huit épisodes par an. Heureusement, quand ils sont plus grands, les choses s'arrangent car ils ont développé une immunité, autrement dit leur système de défense immunitaire a rencontré suffisamment de virus différents pour apprendre à les reconnaître rapidement et donc être plus efficace. Quoi qu'il en soit, les antibiotiques sont inutiles dans la grande majorité des rhinopharyngites puisqu'elles sont généralement dues à un virus. Sans compter qu'il s'agit d'une affection bénigne et qui guérit spontanément en sept à dix jours.
Oui, mais lorsque l'enfant a des sécrétions apparemment purulentes, n'est-il pas temps de passer aux antibiotiques? Là encore, contrairement à une idée reçue, il ne s'agit que de cellules mortes et cela ne signifie pas que la rhinopharyngite se soit surinfectée. Il est bien sûr toujours souhaitable de revoir le médecin si les choses vont de mal en pis mais prendre des antibiotiques en cas de doute n'est pas une stratégie très pertinente. «Le doute a bon dos. On finit par traiter tout le monde», dénonce le Pr Chidiac. C'est d'ailleurs la même chose dans l'otite où la consommation d'antibiotiques reste à des niveaux impressionnants: «Trois millions de doses prescrites chaque année dans l'otite moyenne aiguë!», déplore le Pr Édouard Bingen, microbiologiste à l'hôpital Robert-Debré (Paris). «La majorité des otites ont une évolution spontanément favorable», renchérit le Pr Chidiac, «une simple otite inflammatoire aiguë ne nécessite pas une antibiothérapie. Il ne faut traiter que les vraies otites moyennes aiguës purulentes».
Reste l'angine. «Le problème, explique le Dr Patrick Martin, généraliste à Chennevières, c'est qu'il ne faut utiliser les antibiotiques que lorsqu'il y a un streptocoque, mais pour le savoir encore faut-il faire un test de diagnostic rapide.» Ces fameux tests en seulement sept minutes, entre le prélèvement et le résultat, permettent d'affirmer la présence ou l'absence du germe. Que penser des médecins qui savent distinguer une angine virale d'une angine bactérienne au premier coup d'œil? «Qu'ils sont très forts, s'amuse le Dr Martin. Moi qui utilise le test de diagnostic rapide, je suis régulièrement étonné par le résultat. Tantôt c'est une angine forte qui reste pourtant d'origine virale, tantôt un streptocoque se cache derrière une angine apparemment modérée. Le test rapide est incontournable.»