Le Monde.fr | 21.05.2014 à 23h40 • Mis à jour le 22.05.2014 à 10h06
Nicolas Sarkozy, lors des élections municipales.
Deux mois après une tribune dans Le Figaro, Nicolas Sarkozy sort une nouvelle fois de son silence. L'ancien président de la République publie un texte dans l'hebdomadaire Le Point daté du jeudi 22 mai, à quelques jours des élections européennes, dont les sondages prédisent qu'elles seront dominées en France par l'abstention et les scores du Front national.
Lire : Européennes : chronique d’un désastre annoncé
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La défense de son modèle européen
La tribune de Nicolas Sarkozy est largement consacrée au scrutin du 25 mai, et à sa vision de l'Europe. L'ancien président appelle notamment à une refonte des règles communes européennes concernant l'immigration.
« Il faut suspendre immédiatement Schengen I et le remplacer par un Schengen II auquel les pays membres ne pourraient adhérer qu'après avoir préalablement adopté une même politique d'immigration. »
La déclaration intervient dans un contexte où les critiques à l'égard des accords qui encadrent les conditions de libre circulation dans l'Union européenne ont refait surface à l'occasion des élections.
Lire nos explications : L'espace Schengen en cinq questions
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D'autres passages du texte de Nicolas Sarkozy sont consacrés au rôle des institutions supranationales. Il souhaite notamment :
« La création d'une grande zone économique franco-allemande, cohérente et stable, au cœur de la zone euro. »
Que « la Commission [européenne n'ait plus] de compétences législatives. Puisqu'il y a un Parlement européen, c'est à lui et à lui seul de légiférer. »
Nicolas Sarkozy met par ailleurs en garde contre « l'absence de leadership [qui] met l'Europe en danger, car sans vision, sans cap et sans priorité. (...) L'Europe nous protège des dérives idéologiques de nos gouvernants et des majorités qui les soutiennent. »
L'ancien président développe enfin les notions relatives aux « identités » européennes et françaises.
« Le but de l'Europe n'a jamais été que nous nous ressemblions tous, que nous vivions à l'identique, que nous pensions en tout la même chose. Il est que nous soyons capables de coexister, de fraterniser, de défendre nos justes intérêts ensemble face au reste du monde, et, même de promouvoir un modèle de civilisation européenne. »
Il défend, sur ce point, Alain Finkielkraut, dont l'élection à l'Académie française avait suscité de nombreuses réactions.
« Que l'on ait pu si violemment s'opposer à la candidature à l'Académie Française d'un de nos plus brillants intellectuels au seul motif qu'il y avait dans le titre de son dernier ouvrage le mot identité est à pleurer de bêtise. C'est tout simplement consternant. (...) Ce n'est pas un paradoxe que de plaider tout à la fois pour l'Europe et pour la défense de notre identité, c'est-à-dire de la spécificité de notre modèle. »
Lire le portrait d'Alain Finkielkraut
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Mobiliser la droite
La tribune de Nicolas Sarkozy était attendue à l'UMP, à quatre jours d'élections européennes qui pourraient être marquées par une très forte abstention et qui donne le Front national en tête des intentions de vote.
Lundi, dans Le Figaro, un ancien ministre justifiait une prise de parole nécessaire pour peser sur l'issue du scrutin.
« Les succès électoraux du parti dépendent des paroles prononcées par Nicolas Sarkozy », expliquait-il.
Des ténors de l'UMP, en tête desquels François Baroin, relayé par Brice Hortefeux et Nadine Morano, tous deux têtes de liste UMP, appelaient également depuis des semaines Nicolas Sarkozy à prendre la parole, notamment pour fixer la ligne du parti.
Le sarkozyste Geoffroy Didier, candidat aux européennes en Ile-de-France, déclarait également :
« Son intervention est nécessaire car il est le ciment de l'unité de la droite et du centre, qui va d'Alain Lamassoure à Henri Guaino. »
De leur côté, l'ancien premier ministre François Fillon, comme l'ancien ministre du travail Xavier Bertrand avaient bien jugé « utile » une éventuelle intervention de M. Sarkozy avant les européennes, mais à peine autant que « celle de Valéry Giscard d'Estaing ».
Un silence de deux mois
Nicolas Sarkozy ne s'était plus exprimé directement depuis sa précédente tribune, le 20 mars, à la veille du premier tour des municipales, dans laquelle il répondait aux soupçons pesant contre lui de « trafic d'influence », à la suite de sa mise sur écoute téléphonique par la justice.
Dans un texte intitulé « Ce que j'ai à dire aux Français », Nicolas Sarkozy revenait sur l'affaire révélée par Le Monde. Au lendemain des municipales, avec une UMP arrivée en tête, Jean-Pierre Raffarin, ancien premier ministre, avait affirmé que la tribune de M. Sarkozy avait « contribué à mobiliser la droite ».