Eclaboussé par un scandale de corruption, Recep Tayyip Erdogan, le premier ministre, a ordonné jeudi la mutation d'une vingtaine de procureurs, nouvel épisode de la purge sans précédent engagée dans la police et la justice.
Dans la foulée du scandale de corruption qui l'éclabousse, le gouvernement turc a ordonné, jeudi 16 janvier, la mutation d'une vingtaine de procureurs, signant un nouvel épisode de la purge sans précédent engagée dans la police et la justice.
Le Haut Conseil des juges et procureurs (HSYK), l'institution présidée par le ministre de la justice, a confirmé cette nouvelle vague de réaffectations, qui a notamment touché le procureur général d'Istanbul, Turan Colakkadi. Il a également annoncé l'ouverture d'une enquête sur les conditions du dessaisissement de plusieurs des magistrats chargés de l'enquête qui vise le gouvernement.
Depuis le 17 décembre, plusieurs dizaines de patrons, hommes d'affaires et élus réputés proches du premier ministre islamo-conservateur, Recep Tayyip Erdogan, qui règne sans partage sur le pays depuis 2002, ont été inculpés et/ou incarcérés pour fraude, blanchiment d'argent et corruption. Cette affaire a provoqué la démission de trois ministres et précipité un remaniement gouvernemental d'ampleur le jour de Noël.
Recep Tayyip Erdogan accuse la confrérie du prédicateur musulman Fethullah Gülen, très influente dans la police et la justice, de manipuler l'enquête en cours pour le déstabiliser à la veille des élections municipales du 30 mars et de la présidentielle d'août.
UN PROJET DE RÉFORME JUDICIAIRE TRÈS COTNROVERSÉ
Pour reprendre le contrôle de ces deux institutions, le chef du gouvernement a ordonné des purges de grande ampleur, qui ont notamment visé plus d'un millier de policiers, hauts gradés ou officiers subalternes, et plusieurs procureurs chargés de superviser l'enquête anticorruption.
Il a également déposé au Parlement un projet de loi de réforme judiciaire très controversé qui doit renforcer le contrôle politique sur les magistrats en donnant au ministre de la justice le dernier mot sur les décisions de nomination du HSYK. Ce texte, discuté en commission depuis vendredi, a suscité l'ire de l'opposition, qui le juge contraire à la Constitution et exclusivement destiné à étouffer les enquêtes en cours.
Le premier ministre a offert de le « geler » mardi en échange d'un accord de ses rivaux politiques sur le principe d'une réforme judiciaire, mais l'opposition refuse. Ce projet de réforme a également suscité les mises en garde de l'Union européenne et des Etats-Unis, qui s'inquiètent de « l'indépendance de la justice » turque.