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Turquie : face au scandale, Erdogan remanie son gouvernement en profondeur
Publié le 25.12.2013, 22h55 | Mise à jour : 26.12.2013, 00h51
Recep Tayyip Erdogan, le Premier ministre turc, a profité de la démission de trois de ses ministres pour opérer un remaniement en profondeur de son gouvernement.
Dix ministres remplacés. Le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a cédé à la pression de la rue, ce mercredi soir, en annonçant un vaste remaniement ministériel. Ce dernier fait suite aux démissions en chaîne de trois ministres, ceux de l'Economie, de l'Intérieur et de l'Environnement, pris dans le sillage d'un scandale politico-financier qui éclabousse le gouvernement AKP (parti islamo-conservateur) depuis huit jours.
Parmi les dix ministres finalement écartés, on compte celui des Affaires européennes, pourtant un fidèle du Premier ministre, mais cité par la presse dans le cadre de l'enquête ouverte par la justice. D'autres ministres, candidats aux élections locales de mars prochain, quittent eux leurs postes comme prévu à l'approche de l'échéance, à l'image des tenants des portefeuilles de la Justice, de la Famille et des Transports.
Le spectre des manifestations ressurgit
«Tayyip istifa» (Tayyip démission) ou «La résistance est partout» : les slogans des protestataires, semblables à ceux des cortèges de juin dernier, ont résonné dans les rues de la mégapole turque, ce mercredi soir. A Istanbul, ils étaient en effet près de 5000 manifestants à réclamer la démission du Premier ministre, réveillant le spectre des manifestations, tant redoutées par Erdogan.
La police a dispersé la foule à l'aide de brouillards de lacrymogènes et de «Toma», des canons à eau également de sortie. Les manifestations se sont principalement déroulées dans le quartier de Kadiköy, la rive asiatique d'Istanbul, réputée à gauche. Elles se seraient propagées à Besiktas, quartier célèbre pour héberger les locaux du Premier ministre.
Sur les réseaux sociaux, les protestataires ont enfin appelé à la mobilisation place Taksim, le fief de la contestation stambouliote durant la vague de manifestations il y a six mois. La zone est désormais quadrillée par les policiers anti-émeutes.
- Citation :
Burak Arikan @arikan
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Istanbul Izmir Ankara everywhere in Turkey people took the streets, we demand AKP's total resignation #hukumetistifa
8:49 PM - 25 Dec 2013
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Théorie du complot après le scandale politico-financier
Les influents ministres de l'Intérieur et de l'Economie, démissionnaires, sont en première ligne d'un scandale financier. Les fils de ces élus ont en effet été inculpés et incarcérés dans le cadre d'une importante affaire de corruption. Les ministres ont néanmoins démissionné pour prouver leur innocence. Au total, vingt-quatre personnes, dont des hommes d'affaires et le PDG de la banque publique Halkbank, ont été placées en détention préventive pour leur implication supposée dans un scandale financier d'ampleur. Ils sont soupçonnés d'avoir accepté des pots de vins dans le cadre de projets immobiliers.
A quelques mois des élections locales et de la présidentielle, respectivement en mars et août prochain, la crise tombe au plus mal pour le Premier ministre en poste depuis 2002. Erdogan, adepte de la théorie du complot, dénonce les attaques de la confrérie musulmane de Fethullah Gülen. Il accuse implicitement l'homme d'avoir fomenté un complot. Fethullah Gülen, réfugié aux Etats-Unis, viserait selon Erdogan, à détruire les avancées politiques et économiques réalisées par son gouvernement ces onze dernières années.
En juin dernier, la popularité de Erdogan avait été ébranlée par les manifestations monstres qui avaient secoué le pays. Près de 2,5 millions de Turcs avaient déferlé pour réclamer sa démission, l'accusant d'autoritarisme.
Surnommé «le Sultan» par ses détracteurs, Erdogan conservait ces dernières années une certaine popularité en Turquie. Il y a deux ans, le parti AKP d'Erdogan avait été réélu avec 50% des voix. Mais plus que jamais, 2013 se révèle une année noire pour lui.