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Ayrault : «S'il y a eu une faute, la famille de Leonarda reviendra»
Mis à jour le 16/10/2013 à 16:16 - Publié le 16/10/2013 à 10:25
Face à la polémique qui le menace sur sa gauche, le premier ministre indique que l'arrêté d'expulsion de la collégienne kosovare serait annulé si l'enquête lancée par Manuel Valls montrait qu'une «faute» avait été commise.
Manuel Valls tente de calmer le jeu. Attaqué à gauche après l'expulsion contestée de Leonarda, une collégienne rom de 15 ans originaire du Kosovo, le ministre de l'Intérieur a lancé mercredi matin une enquête administrative, suite à un entretien avec Jean-Marc Ayrault. Elle aura pour but de vérifier «que l'ensemble des règles ont été respectées» dans la procédure d'éloignement, indique Matignon. Ce dont Manuel Valls ne semble pas douter une seconde. «Je comprends toutes les émotions» suscitées par cette action, mais «cette reconduite à la frontière s'est déroulée dans le respect du droit, dans le respect des personnes», a déclaré le ministre en marge d'un déplacement à Lorient. Il appelle «chacun» à «garder son sang-froid» après les vives réactions qui ont émaillé dans les rangs du PS.
Le premier secrétaire du PS, Harlem Désir, demande à ce que la jeune fille puisse revenir en France, «dans sa classe», en attendant le résultat de cette enquête. François Hollande, lui, demande le temps de la réflexion avant de s'exprimer sur l'affaire. «Il veut y voir plus clair avant de commenter les faits», a annoncé la porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem. Jean-Marc Ayrault a pour sa part promis mercredi à l'Assemblée nationale que l'arrêté d'expulsion de la collégienne serait annulé si l'enquête administrative sur cet éloignement, dont les résultats seront connus «dans 48 heures», montrait qu'une «faute» avait été commise. «S'il y a eu faute, l'arrêté de reconduite à la frontière sera annulé. Cette famille reviendra pour que sa situation soit réexaminée en fonction de notre droit, de nos pratiques et de nos valeurs», a assuré le premier ministre.
Pour beaucoup, rue de Solférino, l'expulsion de la jeune fille a été «la goutte d'eau qui fait déborder le vase». La direction du parti était restée silencieuse lorsque Manuel Valls avait remis en cause, à la rentrée, la procédure du regroupement familial. On ne l'avait guère plus entendue après les propos du ministre de l'Intérieur sur l'intégration des Roms. Seule Cécile Duflot et quelques figures de la gauche du PS avaient osé remettre publiquement en cause la ligne du ministre le plus populaire du gouvernement. Une popularité en trompe l'œil, puisque Manuel Valls est désormais plus apprécié à droite qu'à gauche.
Désamour des sympathisants de gauche pour Valls
La vive réaction des leaders du parti suite à l'expulsion de Leonarda est symbolique de ce désamour croissant des sympathisants socialistes vis-à-vis du premier flic de France. «Les circonstances et les responsabilités qui ont amené la préfecture à prendre une telle décision doivent être clairement établies», a déclaré le porte-parole du PS David Assouline, jugeant «choquantes» les conditions dans lesquelles cette élève de 3e de Pontarlier a été remise à la police. «Faire descendre d'un bus par les forces de l'ordre une élève devant l'ensemble de ses camarades de classe est insupportable et inacceptable», a-t-il estimé.
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- «Je demande qu'on sanctuarise l'école et que cette situation ne se renouvelle pas»
Vincent Peillon
Le sujet a été abordé mardi soir lors du bureau national du PS. «Tout le monde était d'accord pour dire qu'il y a eu une bavure», raconte Laurence Rossignol, porte-parole du parti. S'en est suivi une pluie de condamnations sur les réseaux sociaux. Interpellation «insupportable», selon le directeur de cabinet d'Harlem Désir Mehdi Ouraoui, «injustifiable» pour la secrétaire nationale à l'immigration Sandrine Mazetier. Sur son blog, le député Pouria Amirshahi a dénoncé «des décisions aveugles et infâmes» qui constituent une «violence faite à la République».
Mercredi, les poids lourds de la majorité ont pris le relai. «Je souhaite que ce genre de situation ne se renouvelle pas», a assuré à la sortie du conseil des ministres le ministre de l'Éducation Vincent Peillon, qui souhaite que l'école soit «sanctuarisée». «Il y a la loi. Mais il y a aussi des valeurs avec lesquelles la Gauche ne saurait transiger. Sous peine de perdre son âme», a commenté sur Twitter le présient de l'Assemblée Claude Bartolone. Bruno Le Roux, consensuel patron des députés socialistes, a de son côté estimé sur iTélé, que «non, il ne fallait pas expulser» la jeune fille.
«Il n'y a pas eu d'empressement mais application de la loi»
Au PS, certains demandent le retour immédiat et la régularisation de l'adolescente et de sa famille en France. D'autres réclament la démission du préfet du Doubs, Stéphane Fratacci, ancien secrétaire général du ministère de l'Immigration sous Éric Besson. «Le préfet n'a pas été informé de la situation, donc c'est difficile de le mettre en cause», a toutefois affirmé Eric Alauzet, député EELV de la circonscription où résidait la famille de la jeune fille. Le Front de gauche réclame quant à lui, sans autre forme de procès, la démission de Manuel Valls.
Dans la tourmente, le ministre de l'Intérieur estime que la ligne du gouvernement - «fermeté et humanité» - a été respectée. Il estime avoir appliqué «avec fermeté les décisions d'éloignement tout en veillant scrupuleusement au respect des droits des étrangers qui font l'objet d'une mesure d'éloignement». Le ministère tente de minimiser l'évènement, décrit comme «un cas d'immigration irrégulière qui n'a rien à voir avec les campements illicites de roms». «Il n'y a pas eu d'empressement mais application de la loi», explique le porte-parole de Beauvau, Pierre-Henry Brandet.