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Fillon et le FN : pour Marine Le Pen, «le front républicain est mort»
Publié le 15.09.2013, 12h05 | Mise à jour : 19h18
La présidente du Front national Marine Le Pen à l'université d'été de son parti le 15 septembre 2013 à Marseille.
Les propos de François Fillon sur le Front national continuent de créer une ligne de fracture au sein de l'UMP. Après Jean-Pierre Raffarin, qui a estimé samedi que «le pacte fondateur» du parti était «en cause», c'est au tour des ex-ministres Luc Chatel, Xavier Bertrand, Laurent Wauquiez, et Alain Juppé, de fustiger la nouvelle posture de leur ancien chef de gouvernement, sur fond de compétition pour la prochaine élection présidentielle. A gauche, la charge se poursuit. Après Manuel Valls hier, le Premier ministre en personne demande à la droite de clarifier sa position vis à vis du FN.
Vendredi, François Fillon, pourtant réputé modéré, a de nouveau exclu toute alliance avec le Front national lors des municipales, mais tendu la main à ses électeurs et renvoyé une nouvelle fois dos à dos le PS et le FN en matière de «sectarisme». Une prise de distance très nette avec le «front républicain» qu'il défendait auparavant et la stratégie du «ni-ni» (pas d'appel au vote, ni pour le FN, ni pour le PS) adoptée par son parti.
Ayrault accuse la droite de jouer avec le feu
Depuis la Fête de la rose du Parti socialiste de Loire-Atlantique, à Préfailles, le Premier ministre a demandé aux dirigeants de l'UMP de clarifier leur position vis à vis du Front national. «Aujourd'hui la droite française et ceux qui prétendent être candidats à la future élection présidentielle sont en train de jouer avec le feu : c'est dangereux pour les Français, c'est dangereux pour la France, pour ce qu'elle est, et je crois qu'il est temps de réagir», a déclaré Jean-Marc Ayrault.
Aux municipales, a-t-il prévenu, «comme le Front national présentera des listes partout, il peut parfaitement au deuxième tour être dans une position de déterminer ce que fera l'UMP. Si l'UMP ne clarifie pas avant, alors il y aura des alliances entre la droite et l'extrême droite dans certaines communes de France».
Et le chef du gouvernement d'enfoncer le clou : «Je m'adresse à François Fillon mais je m'adresse aussi à Jean-François Coppé, à Jean-Pierre Raffarin, je m'adresse à tous les dirigeants de la droite française.»
Chatel accuse Fillon de «faire la courte échelle» au FN A l'UMP aussi, certains ont sonné la charge contre l'ancien Premier ministre. Sur Radio J, Luc Chatel, qui avait pris fait et cause pour Jean-François Copé durant la primaire interne à l'UMP, a déclaré dimanche «ne pas comprendre» le revirement de François Fillon vis-à-vis du FN, qui revient à ses yeux à faire «la courte échelle» au parti de Marine Le Pen.
- Citation :
- Luc CHATEL ✔ @LucChatel
La position de l'UMP doit rester claire. Ni PS ni FN, ni défaitisme ni trahison de nos valeurs. #radioJ
12:25 PM - 15 Sep 2013
Invité de France 3, Xavier Bertrand, député-maire de Saint-Quentin, s'est, lui, interrogé à voix haute : «Est-ce qu'il y a dans cette déclaration ambigüe de François Fillon un calcul politicien ? Si c'en est un, c'est un mauvais calcul.» Pour définir sa position personnelle face au FN, il s'est référé à celle de Philippe Séguin, dont François Fillon se revendique, qui avait toujours refusé «toute collusion» avec le parti d'extrême droite. «Je reste fidèle à cette vision du séguinisme.» Xavier Bertrand et Luc Chatel en ont profité pour tendre la main à l'UDI, qui tient ce moment son université d'été, pour riposter à la montée du FN et battre la gauche.
Juppé dit son «incompréhension» Quant à Laurent Wauquiez, il «ne partage pas» la position de François Fillon qu'il avait pourtant soutenu lors de la bataille pour la présidence de l'UMP l'an dernier. «Ma position est assez simple par rapport au FN : je ne voterai jamais FN et je ne peux plus voter PS, parce que je ne peux pas soutenir ce qu'ils sont en train de faire», a affirmé sur Canal + le député-maire du Puy-en-Velay.
L'ancien Premier ministre, Alain Juppé, qui avait déjà pris ses distances cette semaine, a pour sa part dit son «incompréhension» sur son blog. «Je ne comprends pas ce qui a pu pousser François Fillon à déclarer qu’en certaines circonstances, il pourrait apporter sa voix à un candidat du Front National. Car c’est bien ce qu’il a dit», a écrit le maire UMP de Bordeaux. «Philippe Séguin n’était-il pas sa référence ?» s'est-il encore interrogé, assurant ne pouvoir croire que « la volte-face de François Fillon», pourrait s'expliquer «par un calcul politique de
repositionnement tactique au sein de l’UMP et de l’opposition». «Mais ma naïveté est peut-être encore grande…»
Baroin ne «cherchera pas querelle» à Fillon Très attendu sur la question, l'ex-ministre de l'Economie, François Baroin, a prévenu d'emblée, sur le plateau du Grand Jury RTL/«Le Figaro»/LCI : «Je ne lui chercherai aucune querelle sur ce sujet.» «Je sais qu'il ne votera jamais Front national et qu'il sera toujours de ceux qui combattent le Front national», a encore assuré le député-maire de Troyes, indiquant qu'il s'était expliqué avec François Fillon par téléphone. Sous le regard d'un des lieutenants de l'ex-Premier ministre, Eric Ciotti, qui était présent dans le public, François Baroin a certifié que «rien ne nous éloignera du pacte fondateur de l'UMP».
D'autres à l'UMP se réjouissent au contraire nettement de ce qu'ils considèrent comme un revirement de l'ancien Premier ministre. Cofondateur du courant de la Droite populaire, Thierry Mariani a déclaré dans le JDD constater «avec satisfaction que François Fillon a évolué» dans sa position sur le FN. Comme «nous avons de plus en plus de difficultés à expliquer qu'il y a une frontière infranchissable entre l'UMP et le FN, et donc pas d'alliance possible, notre seule solution est de changer complètement de tactique», a-t-il estimé. A ses yeux, le FN est «un parti démocratique, puisqu'il se plie aux élections, aussi démocratique que le Parti communiste» et doit être traité «comme les autres partis», notamment pour montrer «à quel point son programme économique est inapplicable».
Le Pen se frotte les mains Ce combat idéologique au sein de l'UMP ne peut que réjouir Marine Le Pen. L'UMP «brille d'une lumière d'étoile morte», a lâché ce dimanche matin la patronne du FN. Interrogée avant le début de la seconde journée de l'université d'été de son parti à Marseille, elle a déclaré : «Je disais qu'elle (l'UMP) était en voie d'implosion et c'est ce qui s'est passé, une implosion sur un certain temps, une implosion molle.»
Lors de son discours de clôture la présidente du FN est revenue très peu sur cette polémique. «Le front républicain est mort», «la funeste bipolarisation de la politique est enterrée» a-t-elle encore déclaré. «Les électeurs adhèrent de plus en plus à nos idées», «le vote FN, n'est plus un vote protestataire mais d'adhésion, d'espoir» a-t-elle encore déclaré dans un discours avec des accents de meeting présidentiel.
Peillon : «C'est une erreur très profonde et un suicide personnel»
«D'une certaine façon il y a un problème de fond, a estimé le ministre de l'Education nationale Vincent Peillon, interrogé dans l'émission «Tous politiques» sur France Inter et France 24 avec Le Parisien-Aujourd'hui en France. «Je ne comprend pas et je n'accepte pas ces propos, a ajouté le ministre socialiste. On n'est plus dans le dérapage. Je pense que c'est une erreure très profonde. Du point de vue politique, c'est un suicide personnel. C'est étonnant et ça ne cadre pas. Sur le plan personnel c'est incompréhensible et inquiétant sur le plan politique.»