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Les pro-Morsi défient les partisans de l'armée
Publié le 26/07/2013 à 20:57Une partisane du président égyptien déchu Mohammed Morsi brandit une photo de l'ancien dirigeant lors d'une manifestation à Nasr City. Les manifestants y ont installé leur camp pour leur rassemblement quotidien.
Les manifestants, après la prière du vendredi.
Sur la pencarte est écrit «Dieu vous tiendra pour responsable».
À un autre endroit de la ville, un manifestant anti-Morsi salue un hélicoptère avec le drapeau egyptien. «Nous sommes l'Egypte!», scande la foule. À chaque survol des lourds hélicoptères militaires, la place retentit des applaudissements de la foule.
Un autre se protège du soleil avec une affiche du chef de l'armée Abdel Fattah al-Sissi. Le chef de l'armée a exhorté les Egyptiens à manifester vendredi massivement pour lui donner «mandat» d'en «finir avec le terrorisme et la violence».
Des anti-Morsi suspendent un portrait du chef des armées
La mère d'Amr Eid, manifestant anti-Morsi décédé il y a quelques jours lors d'affrontements, est reconfortée par ses filles pendant la manifestation de soutien à l'armée.
Partisans et adversaires du président déchu s'affrontent dans les rues d'Alexandrie.
La ville s'embrase.
Le général al-Sissi triomphe sur la place Tahrir tandis que l'ex-président est plébiscité dans la périphérie du Caire.
Il dit qu'il n'a plus rien à perdre. Ou si peu. La peau brûlée par le soleil, il tourne comme un pantin devant le mémorial de l'ex-président Sadate, en brandissant un portrait géant de Mohammed Morsi. Habituellement gardé par deux conscrits, le monument en forme de mini-pyramide, en plein cœur de Nasr City, a été placé sous haute surveillance militaire.
Deux jours plus tôt, le général Abdel Fattah al-Sissi, à l'origine de la destitution de l'ex-raïs islamiste, a appelé ses concitoyens à descendre dans la rue, ce vendredi, pour lui «donner mandat afin d'en finir avec le terrorisme». Alors lui, l'avocat de 40 ans, celui qui se présente comme «le défenseur de la légitimité», s'est empressé de rejoindre un des trente cortèges rivaux qui arpentent les rues du Caire depuis la fin de la prière de la mi-journée. «Regardez toutes ces femmes et ces hommes! Où sont nos armes? Où sont nos bombes? C'est Sissi le terroriste, pas nous!», s'égosille l'homme qui se présente sous le prénom d'Ashraf, en faisant allusion à la mort de partisans de Morsi, début juillet, sous les balles de militaires. Autour de lui, sous l'œil alerte des dizaines de soldats, la foule gonfle à vive allure. Ils arrivent de Helwan, de Mansoura, du Fayoum, ou encore de la mosquée de Rabia al-Adawiya. Depuis la chute de Morsi, le 3 juillet, les alentours de l'édifice religieux, situé à un kilomètre à peine du mémorial, se sont transformés en camp retranché des supporteurs de l'ancien président.
- Citation :
- Signe d'une minifronde qui émerge timidement à l'ombre des deux clans rivaux, plusieurs activistes ont rallié une troisième place, en arborant des portraits de Morsi et de Sissi rayés par une croix rouge.
Essam, lui, arrive tout juste d'Alexandrie. La bouche asséchée par le jeûne du Ramadan, c'est un vrai moulin à paroles. «Vous avez entendu la dernière: ils veulent placer Morsi en détention préventive pour son évasion de prison pendant la révolution, et l'aide que lui aurait apporté le Hamas. C'est tout ce qu'ils trouvent à lui reprocher? Les Palestiniens sont nos frères. Quant à Moubarak, ils l'ont laissé jouer aux agents d'Israël sans rien dire», lâche-t-il. En guise de contestation, Essam dit qu'il entend «protester pacifiquement» dans la rue «jusqu'au retour de Morsi». Au risque, poursuit-il, «de mourir en martyr».
En cette journée à haut risque, la place Tahrir est, elle aussi, noire de monde. Au-dessus des têtes, un seul portrait domine la foule: celui du nouvel homme fort du pays, lunettes de soleil et képi vissé sur la tête. «Sissi est un héros. S'il se présente aux futures élections, je vote pour lui les yeux fermés!», entonne Mohammed Tantaoui, un ingénieur de Mansoura. Pour lui, «les Frères musulmans sont des terroristes. Il faut à tout prix les éradiquer. Leur place est derrière les barreaux, pas au gouvernement». Reprenant à son compte un discours particulièrement virulent envers la Confrérie, omniprésent dans les médias depuis la fermeture des télévisions proches des Frères, il se félicite du nouvel ultimatum de l'armée, fuité sur l'Internet, qui donne 48 heures aux pro-Morsi pour «cesser la violence et accepter le processus de transition».
Les hélicoptères applaudis
Soudain, des hélicoptères font leur apparition dans le ciel de Tahrir. Sous les applaudissements, une fontaine d'eau se déverse des appareils sur les têtes joyeuses. «Armée! Armée! Tu es notre sauveuse!», aboie une mère de famille. La quarantaine, Raheb Mohammed s'est déplacée avec sa brochette de sœurs et de cousines, toutes voilées de foulards chatoyants. «Morsi nous avait pris en otages. Nous vivions dans les ténèbres. Sissi nous a libérés», dit-elle. Avant d'ajouter, en embrassant amoureusement un poster du chef d'état-major de l'armée: «Aujourd'hui, la place Tahrir vibre à nouveau d'espoir!»
Mais pour les ex- révoltés de Tahrir, l'ancien épicentre de la révolution de février 2011 contre Moubarak est aujourd'hui tristement méconnaissable. Grand absent du jour, le Mouvement des jeunes du 6 avril a préféré boycotter ce rassemblement. Selon eux, les militaires cherchent à faire endosser au peuple la responsabilité d'un nouveau massacre de manifestants islamistes. Signe d'une minifronde qui émerge timidement à l'ombre des deux clans rivaux, plusieurs activistes ont rallié une autre place, celle du Spinx, baptisée la «troisième place», en arborant des portraits de Morsi et de Sissi rayés par une croix rouge. «Ces deux leaders, tout comme leurs supporteurs, ne peuvent nous garantir que la violence», souffle l'un d'eux. En fin de journée, ses craintes se sont vite illustrées avec de nouveaux heurts dans le quartier Shobra et dans la ville d'Alexandrie qui ont fait deux morts.