WEB - GOOGLE - ACTUALITE > International
Egypte : heurts meurtriers au Caire entre pro et anti-Morsi
Le 05.07.2013 à 21h06 • Mis à jour le 05.07.2013 à 23h12
Deux jours après le renversement du président égyptien par l'armée, anti et pro-Morsi sont descendus dans les rues du Caire, vendredi 5 juillet. Pour contrer l'appel à défiler lancé jeudi par les islamistes, les opposants au président déchu ont investi à leur tour les rues de la capitale égyptienne. Selon la télévision d'état, qui cite le ministère de la santé, dix-sept personnes ont été tuées dans des violences qui ont éclaté dans plusieurs villes d'Egypte. Il n'a pas fourni plus de détails sur la localisation des victimes.Affrontements meurtriers aux abords de la place TahrirDeux personnes ont trouvé la mort vendredi soir et 70 autres ont été blessées, aux abords de la place Tahrir du Caire, dans des affrontements entre des partisans et des opposants au président Mohamed Morsi. Des tirs étaient entendus et les deux camps se jetaient des pierres sur le pont du 6-Octobre à proximité de la place emblématique de la capitale égyptienne, tandis que des ambulances transportaient des blessés. L'armée a annoncé son intention d'intervenir.
"Nous ne prenons pas parti. Notre mission est de protéger la vie des manifestants", a affirmé le colonel Ahmed Ali.
"L'armée va intervenir pour séparer" les deux camps, a-t-il ajouté.
Dans la journée des échanges de tirs entre des soldats et des partisans de M. Morsi approchant le batiment où est détenu le président déchu ont fait trois morts. Deux corps ont été couverts d'un drap blanc, et un troisième gisait, la tête fracassée par une balle. Les tirs ont eu lieu aux abords d'un bâtiment de la garde républicaine, une unité militaire chargée de protéger la présidence égyptienne. En outre, deux policiers égyptiens ont été tués par balles devant un bâtiment gouvernemental d'El Arish, une ville proche de la frontière avec la bande de Gaza et Israël, dans le Sinaï, ont annoncé des sources médicales.
Le guide des Frères musulmans demande le rétablissement de MorsiLe guide suprême des Frères musulmans, Mohamed Badie, s'est dit prêt à un accord avec l'armée en Egypte à condition que Mohamed Morsi, issu de la confrérie islamiste, soit au préalable rétabli dans ses fonctions de président. Mohamed Badie s'exprimait devant une foule de sympathisants islamistes réunis aux abords d'une mosquée de la banlieue du Caire.
"Nos poitrines sont plus fortes que leurs balles", a-t-il dit alors qu'un hélicoptère militaire survolait le rassemblement.
Il avait demandé la poursuite des manifestations jusqu'à ce que les Frères musulmans puissent porter Mohamed Morsi
"sur [leurs] épaules". Le président déchu est détenu par l'armée depuis mercredi soir. Le parquet avait ordonné jeudi l'arrestation de Mohamed Badie. Des sources proches des services de sécurité avaient également signalé son arrestation, ce que la confrérie avait démenti.
La justice libère deux hauts dirigeantsLe procureur général égyptien a libéré vendredi soir Saad al-Katatni, le chef du Parti de la justice et de la liberté, vitrine politique des Frères musulmans, et l'adjoint du Guide suprême de la confrérie, Rached Bayoumi, a indiqué l'agence officielle Mena.
L'Assemblée dissoute, nomination d'un nouveau chef du renseignementLe président par intérim, Adli Mansour, a décidé de dissoudre la chambre haute du Parlement (Choura), dominée par les islamistes, et de nommer un nouveau chef des services du renseignement. La chambre haute, qui assumait la totalité du pouvoir législatif après la dissolution, l'an dernier, de la chambre des députés, était acquise au président Mohamed Morsi. M. Mansour a aussi nommé un nouveau chef du renseignement, Mohammed Ahmed Farid, a indiqué l'agence d'information officielle MENA (Middle East News Agency)
L'Egypte ferme le terminal de Rafah à la frontière avec GazaLes autorités égyptiennes ont fermé vendredi le point de passage de Rafah, à la frontière avec la bande de Gaza, en raison d'attaques lancées dans le Sinaï après la destitution du président Mohamed Morsi. Des sources de sécurité égyptiennes ont affirmé que le terminal, unique accès au territoire palestinien qui ne soit pas contrôlé par Israël, avait été fermé pour une période indéterminée.
Des opposants à Mohamed Morsi réunis place Tahrir, le 5 juillet.
L'Union africaine suspend l'Egypte[/list]Le Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine (UA) a suspendu vendredi la participation de l'Egypte à l'organisation panafricaine. L'UA a pour politique de suspendre tout Etat membre où se produit un
"changement inconstitutionnel de pouvoir". Cette mesure dure généralement jusqu'au retour à l'ordre constitutionnel. L'Egypte, par la voix de son ministre des affaires étrangères, dit
"regretter profondément" la décision de l'UA.
Des ONG dénoncent la répression contre les médias islamistesLes principales organisations non gouvernementales (ONG) de défense des droits humains en Egypte ont dénoncé vendredi la fermeture de plusieurs médias tenus par les islamistes, après le renversement, mercredi, du président Mohamed Morsi. Dans un communiqué commun, sept d'entre elles condamnent l'interruption de la diffusion de Misr 25, la chaîne des Frères musulmans, le mouvement de M. Morsi, et la saisie d'une édition de leur journal,
Horeyya wal Adala.
Par ailleurs, ajoute le texte, les forces de sécurité ont arrêté des employés de plusieurs médias, dont ceux d'Al-Jazira Mobasher Egypte (filiale de la chaîne qatarie Al-Jazira), qui avait diffusé après sa destitution un enregistrement vidéo dans lequel M. Morsi se disait
"le président élu d'Egypte". Les télévisions Al Rahma, Al Nas, Khalijia (salafiste) ont également été coupées, indiquent les ONG, dont l'Initiative égyptienne pour les droits de la personne. Selon des témoins, les manifestants ont traversé un pont sur le Nil et ont évité la place Tahrir, où se trouvent les opposants à l'ancien président, pour se rendre devant le siège de la télévision nationale, dans le quartier de Maspero. Des soldats et des véhicules blindés sont stationnés à proximité.
L'ONU appelle au respect des libertésLa haute-commissaire aux droits de l'homme des Nations unies, Navi Pillay, a appelé vendredi au respect des libertés fondamentales en Egypte et s'est déclarée préoccupée par les informations sur des arrestations en masse de dirigeants de la confrérie des Frères musulmans. Dans sa première réaction à la destitution et à l'arrestation du président Mohamed Morsi, Mme Pillay affirme qu'il
"ne doit pas y avoir d'autres violences, de détentions arbitraires, d'actes illégaux de vengeance".
Synthèse : Les réactions internationales, entre embarras, félicitations et condamnationM
me Pillay relève que, pour le moment, le pays a échoué à évoluer vers une société de tolérance, fondée sur les principes des droits de l'homme et l'Etat de droit. Elle appelle notamment au respect de la liberté d'expression et de réunion et demande
"de sérieuses mesures pour arrêter et enquêter sur les effarantes violences sexuelles – qui semblent parfois organisées – contre les manifestantes". Embarrassé après le renversement du premier président démocratiquement élu en Egypte, l'Occident continue d'exprimer son inquiétude, et Washington a également demandé au pouvoir de ne pas procéder à des
"arrestations arbitraires" à l'encontre de M. Morsi, détenu par l'armée, et de ses partisans.
Démission du procureur généralQuelques jours à peine après sa réintégration, le procureur général a annoncé vendredi qu'il allait démissionner, invoquant de possibles conflits d'intérêts dans de futures instructions d'affaires judiciaires. Abdel Méguid Mahmoud, qui fut nommé à ce poste sous Hosni Moubarak, avait été démis en novembre 2012 par le président Mohamed Morsi. Il avait été réintégré dans ses fonctions cette semaine sur décision de justice.
L'analyse de Christophe Ayad, chef adjoint du service International du "Monde" :