Fillon manque son pari contre la «ligne Buisson»

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Fillon manque son pari contre la «ligne Buisson»

Publié le 19/11/2012 à 23:45


François Fillon en campagne, le 17 novembre.

L'ancien premier ministre n'a pas contesté les résultats de l'élection.

Le favori des sondages a perdu. À 58 ans, François Fillon rate la première étape d'une course d'obstacles qui, dans son esprit, devait lui permettre de conquérir en 2016 l'investiture de l'UMP pour la présidentielle de l'année suivante. A-t-il commis une erreur stratégique en confondant volontairement les échéances? Fin août, il expliquait à Strasbourg que prendre la tête de l'UMP n'était pas pour lui un «objectif en soi».

Certains de ses proches lui avaient d'ailleurs déconseillé de se lancer dans l'aventure, arguant qu'il ferait bien mieux de cultiver un peu de «hauteur» pour ne pas abîmer une popularité exceptionnelle après cinq ans à Matignon, et qui a encore crû après la défaite de la droite aux législatives.

Mais voilà: Jean-François Copé était dans la place et voulait y rester. Certes, on peut avoir le parti et rater l'investiture présidentielle, comme François Hollande l'a prouvé aux dépens de Martine Aubry. Mais François Fillon n'a pas voulu courir le risque de laisser cet avantage à son adversaire. L'ancien premier ministre a annoncé sa candidature dès le 30 juin, par un tweet: «Mon devoir est de rassembler toutes les familles de la droite et du centre. Je suis candidat à la présidence de l'UMP!»

«Approche plus sereine»

Campagne oblige, il a forcé sa nature. On ne l'a pas vu «faire le singe savant», comme disait Michel Rocard, lui aussi peu porté sur les effusions militantes, mais il a appris à accorder quelques minutes à ses admirateurs à la fin des meetings. Parfois même, il s'est laissé approcher par les journalistes qui le suivaient. Un changement radical après cinq ans d'isolement volontaire, mais qui n'a pas suffi face à l'hyper-communicant Jean-François Copé.

Sur le fond, en revanche, François Fillon n'a rien voulu abdiquer de ses convictions. Au contraire: Jean-François Copé ayant calqué sa campagne sur celle de Nicolas Sarkozy, l'ex-premier ministre a pu exprimer à voix haute sa différence avec l'ex-président. Interrogé par Le Pointle 23 août, il a défini le «fillonisme» comme «une approche plus sereine et pragmatique des choses» que le «sarkozysme». Au cours des semaines, Fillon s'est enhardi jusqu'à remettre en cause les choix stratégiques du président sortant, au premier rang desquels ce qu'il est convenu d'appeler la «ligne Buisson».

Cette prise de distance a constitué son deuxième handicap auprès de militants déjà nostalgiques de l'ancien président. L'ex-protégé de Philippe Séguin, qui se revendique, comme lui, du «gaullisme social», s'est refusé à croire que l'UMP pouvait se retrouver dans l'image de la «droite décomplexée» que lui proposait Jean-François Copé. Ses informateurs dans le camp adverse ont eu beau lui rapporter que les militants applaudissaient à tout rompre le secrétaire général quand il leur promettait de lutter contre le «racisme anti-Blancs», il n'a pas arrêté de marquer sa réprobation. Mal lui en a pris.

Le positionnement de Fillon était d'autant plus risqué qu'il n'a cessé de protester de sa «loyauté» vis-à-vis de Sarkozy, tout en prévenant qu'il ne s'effacerait pas si l'ancien président décidait de tenter à nouveau sa chance en 2017. Les militants ne lui ont pas pardonné ce crime de lèse-majesté.