La mandole de Mohamed Rouane a vibré en Corse : Musique, amitié et affection

LA MANDOLE DE MOHAMED ROUANE A VIBRÉ EN CORSE :

Musique, amitié et affection

Jeudi 17 Novembre 2011

Par Danièle MAOUDJ (*)


L'artiste au summum de son art

C'était pendant la semaine du 8 au 12 novembre 2011 dans le cadre des rencontres musicales de Méditerranée présidé par Guy Dongradi.

L'originalité de ces rencontres réside dans le fait que cette année encore, pour la 13e édition, 262 artistes venus des quatre coins de Méditerranée s'adressent à un jeune public dans l'île de Corse, unis aux artistes insulaires qui se produisent pour un flamboyant final sur la scène du théâtre de Bastia et offrir au public une gerbe de notes où brille la devise: Fraternité et Solidarité. Cette année, l'Egypte a été l'invité d'honneur entourée de l'Algérie, de l'Espagne, de l'Italie, du Maroc, du Portugal et de la Tunisie. La démarche se veut pédagogique en éveillant les toutes jeunes oreilles à des sons sortis des entrailles humaines éloignés de la bouillie sonore d'une musique qui n'en a que le nom, dont son seul but est de formater les jeunes citoyens au même titre que celui d'imposer les mêmes goûts tant culinaires que ceux de la pensée. Cette démarche qui rêve de rompre avec la pensée unique donne à entendre à la jeunesse corse la diversité des cultures musicales du sud et du nord de la Mer Blanche et permet aux artistes de se retrouver et faire éclore de futures créations. Durant une semaine, les jeunes insulaires vivent sur une scène où les antagonismes et les conflits laissent place aux accords parfaits entre les différentes composantes des peuples de Méditerranée, où le temps d'une semaine de la culture, des immigrés en Corse qui en sont les représentants, découvrent leurs cultures valorisées dans un partage fraternel. C'est l'un des objectifs du président Guy Dongradi et de son équipe qui offre son temps gracieusement:

«Ces rencontres sont le fruit d'une coopération fraternelle entre les meilleures structures et académies musicales des pays du Bassin méditerranéen. Aire de dialogue interculturel, d'échanges et de partage, les liens construits y sont durables». C'est donc dans cet espace convivial que Mohamed Rouane et ses compagnons ont honoré l'Algérie en offrant aux jeunes de l'île une musique associant tradition et modernité dans une générosité et une spiritualité qui a su subjuguer toutes ces centaines d'enfants qui découvraient les rondeurs sensuelles des notes de la mandole. En effet, l'artiste Rouane, à la sensibilité discrète, unit avec talent la source à laquelle il a bu, les mélodies de son enfance algérienne à celle de la Casbah, haut lieu de résistance algérienne, aux couleurs du jazz et autres sonorités accueillies lors de ses voyages. Entouré de Raffaël Coz, qui joue pour la seconde fois avec Mohamed Rouane, avec son harmonica, Raffaël a déployé toutes les couleurs de l'arc-en-ciel de l'âme et offre au poète de la mandole une palette d'ouverture qui, selon ses propos, «enrichit ma musique notamment pour consolider cette quête spirituelle». Pour Rouane, une preuve supplémentaire qu'entre êtres humains de cultures différentes, il y a un terreau commun à tous: l'humanisme.

Aux côtés de la mandole et de l'harmonica épaulé par le strident de la guimbarde, la guitare et la basse de Malik Ziad, vieux complice, a renforcé l'épaisseur des rythmes. Et pour donner de l'écho aux battements de l'amour, la calebasse et le cajon du percussionniste Hassan Boukourrou avec lequel Rouane jouait pour la première fois, nous assistions à une communion parfaite qui transportait le public vers les cimes de l'apaisement et de toutes les réconciliations. Mohamed Rouane ravi de son séjour en Corse, pays dans lequel il ne s'est pas senti dépaysé: «La mer, la montagne, je me crois à Azzefoun, j'y respire le même air qu'à Alger, espère renouveler cette aventure. «Tous les quatre nous avons concocté des projets et je m'en réjouis que ce soit dans votre île que naissent de nouvelles idées de création qui, j'espère, aboutiront, et dans ce cas nous vous inviterons à Alger». Egalement des projets pleins la tête avec les groupes corses Diana di L'Alba et les Surgenti, tout un programme de fédération des peuples de Méditerranée où l'amitié sera la partition et les notes la terre glaise qui liera nos destinées avec au coeur l'Amour, miroir de nos cultures. Rendez-vous est donné par le vice- ministre égyptien pour septembre à Alexandrie, séduit par le concept corse et a publiquement sollicité Guy Dongradi pour l'épauler, et bien sûr retour en novembre 2012 à Bastia. Oui, l'amitié nous mène vers les cimes de l'affection, la Corse par ses rencontres apporte sa part de lumière au phare qui brille en Méditerranée et sont autant de remparts contre toutes formes d'intégrisme et de barbarie. Merci à toutes et à tous de cet engagement où une volonté solidaire donne tout son sens à l'amitié.

(*) Poète, essayiste kabylo-corse et cofondatrice du Festival du film des cultures méditerranéennes.