Le Monde.fr avec AFP | 03.03.2014 à 18h20 • Mis à jour le 03.03.2014 à 20h18
Abdelaziz Bouteflika, en 2013.
Le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, a déposé lundi 3 mars en personne au Conseil constitutionnel son dossier de candidature à un quatrième mandat. Sur les images diffusées par la télévision publique, M. Bouteflika est apparu assis dans un fauteuil face au président du Conseil constitutionnel, Mourad Medelci. D'une voix à peine audible, il a déclaré être « venu déposer officiellement [s]a candidature conformément à l'article 74 de la Constitution et à la loi électorale ».
L'article 74 de la Constitution dispose en particulier que le « président de la République est rééligible ». Cette disposition, qui a supprimé la limitation du nombre de mandats présidentiels, avait été approuvée lors d'une révision constitutionnelle partielle en novembre 2008, permettant à M. Bouteflika de briguer un troisième quinquennat en avril 2009.
Selon l'agence algérienne APS, plus de quatre millions de signatures ont été collectées dans les 48 départements du pays et auprès d'élus municipaux, du Parlement et des citoyens. Pour être retenus, les candidats doivent récolter la signature de 60 000 électeurs ou celle de 600 élus dans au moins 25 départements.
M. Bouteflika, 77 ans, au pouvoir depuis 1999, briguera un 4e mandat malgré des problèmes de santé qui alimentent les doutes sur sa capacité à diriger le pays. En avril 2013, un accident cardio-vasculaire l'avait contraint à se faire soigner en France et à rester absent 80 jours. Le président algérien ne s'est plus exprimé en public depuis un discours à Sétif, ville de l'ouest algérien, en mai 2012. C'est son premier ministre qui s'était chargé d'annoncer sa candidature, le 22 février.
DEUX CANDIDATS SE RETIRENT DE LA COURSE
Deux candidats à l'élection présidentielle du 17 avril, dont l'ancien chef du gouvernement Ahmed Benbitour (1999-2000), ont eux annoncé lundi leur retrait de la course, jugeant le scrutin joué d'avance. « En réalité, les urnes ne seront qu'un leurre et une piraterie légalement soutenue. Une fois de plus, en Algérie, les forces de la fraude auront pris le dessus sur l'argumentation convaincante (...) », a affirmé M. Benbitour.
« L'usage inconsidéré des deniers publics, le maintien d'un gouvernement dont les membres sont notoirement connus pour leur allégeance au candidat président [Abdelaziz Bouteflika] (...) la confiscation des médias audiovisuels publics, font que les élections d'avril 2014 se présentent, une fois de plus, comme une rupture du pouvoir avec le peuple », a-t-il ajouté. M. Benbitour, première personnalité a avoir annoncé en décembre 2012 son intention de briguer la présidence, s'est déclaré « solidaire » de ses « partenaires politiques qui ont lancé un appel au boycott » du scrutin.
Le général à la retraite Mohand Tahar Yala a également annoncé lundi qu'il renonçait à se porter candidat à l'élection présidentielle « truquée à l'avance pour imposer un quatrième mandat » de M. Bouteflika. Estimant qu'un « clan maffieux a pris en otage le pays pour se maintenir coûte que coûte au pouvoir », M. Yala, ancien commandant des forces navales (2002-2005), a plaidé pour « l'arrêt du processus électoral en cours et la mise en œuvre d'une période de transition » de pas plus de deux ans. Avec un gouvernement d'union nationale au pouvoir, un collège de personnalités à « la probité incontestable » devrait alors concevoir un « nouvel édifice institutionnel » qui sera soumis à référendum.
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MULTIPLES DÉNONCIATIONS D'UNE « FRAUDE » ANNONCÉE
Jeudi, un ancien chef du gouvernement, Mouloud Hamrouche (1989-1991), avait appelé à faire tomber le régime du président Bouteflika « dans le calme », avec l'aide de l'armée, invoquant une « fraude » annoncée. Auparavant, l'ex-président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Saïd Sadi, figure majeure de l'opposition, avait appelé ses compatriotes à se mobiliser pour « discréditer ce scrutin, de sorte à laisser l'actuel président candidat à sa propre succession se concurrencer lui-même ».
Samedi, la police a empêché des dizaines de personnes de se rassembler devant la faculté centrale d'Alger pour dénoncer la candidature de M. Bouteflika. Plus de 80 personnes, parmi lesquelles de vieux routiers de la vie politique dont un ex-premier ministre de M. Bouteflika, Ali Benflis, ont annoncé leur candidature. Celles-ci ont jusqu'à mardi minuit pour être déposées. Le Conseil constitutionnel annoncera dix jours plus tard les candidats retenus.
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